La ville de Springfield, dans l’Ohio, a annoncé jeudi la fermeture de son hôtel de ville, car elle a déclaré qu’une alerte à la bombe avait été émise contre plusieurs installations dans la communauté d’environ 60 000 personnes.
Les responsables de la ville ont déclaré dans un message publié sur Facebook qu’une menace par courrier électronique avait été reçue juste avant 8h30 HE.
« La ville de Springfield a reçu une alerte à la bombe qui a provoqué une réponse immédiate des forces de l’ordre locales et régionales. Par mesure de précaution, le bâtiment a été évacué et les autorités mènent actuellement une enquête approfondie », peut-on lire dans le communiqué.
Les autorités n’ont pas divulgué le contenu spécifique de la menace, mais elle intervient quelques jours seulement après une publication sur les réseaux sociaux mentionnant la ville qui accusait sans fondement les immigrants haïtiens d’avoir enlevé et mangé des animaux domestiques, une affirmation ensuite propagée par les deux républicains sur le ticket présidentiel, Donald Trump et JD Vance.
« Ils mangent les chiens. Ils mangent les chats. Ils mangent les animaux de compagnie des gens qui vivent là-bas », a déclaré Trump lors du débat présidentiel de mardi soir, en réponse à une question sur les raisons pour lesquelles il avait influencé les républicains à torpiller un projet de loi bipartisan portant sur les problèmes frontaliers et l’immigration illégale.
La candidate démocrate à la présidentielle Kamala Harris a qualifié Trump d’« extrême » et a ri après son éclat de voix. Les démocrates et les défenseurs de l’immigration ont accusé leurs adversaires d’attiser les stéréotypes racistes au risque de mettre en danger la sécurité de la communauté.
Le modérateur de la chaîne ABC, David Muir, a fait remarquer à Trump que les responsables municipaux avaient démenti ces informations, ce à quoi le candidat a protesté à plusieurs reprises en affirmant avoir vu « des gens à la télévision » parler de leurs animaux de compagnie mangés. Trump n’a pas donné de détails.
La police de Springfield a également déclaré n’avoir reçu aucun rapport de ce type.
Lors du débat présidentiel sur ABC News, l’ancien président Donald Trump et la vice-présidente Kamala Harris se sont affrontés dans un échange de plus en plus houleux qui a poussé Trump à réagir aux attaques de Harris. Andrew Chang analyse les moments qui ont poussé Trump à se mettre sur la défensive.
« Des récits barbares et inhumains »
Ces publications créent un faux récit et pourraient être dangereuses pour les Haïtiens aux États-Unis, selon Guerline Jozef, fondatrice et directrice exécutive de la Haitian Bridge Alliance, un groupe qui soutient et défend les immigrants d’origine africaine, dans une interview avec l’Associated Press.
« Nous sommes toujours la cible de toutes sortes de discours et de traitements barbares et inhumains, en particulier lorsqu’il s’agit d’immigration », a déclaré Jozef.
Springfield a commencé à faire l’objet d’une attention déplacée après le 6 septembre, lorsqu’une publication sur X a fait surface qui partageait ce qui ressemblait à une capture d’écran d’une publication sur les réseaux sociaux. La publication retweetée parlait de « l’amie de la fille du voisin » de la personne qui avait vu un chat pendu à un arbre pour être abattu et mangé, affirmant sans preuve que des Haïtiens vivaient dans la maison. La photo qui l’accompagnait montrait un homme noir marchant avec ce qui semblait être une bernache du Canada à ses pieds.
Des commentateurs conservateurs de premier plan en ligne tels que Charlie Kirk et Ian Miles Cheong ont partagé la publication, tout comme le propriétaire de X, Elon Musk.
Vance a publié plusieurs articles sur le sujet, avant d’admettre mardi matin qu’il était « bien sûr possible que toutes ces rumeurs se révèlent fausses ». Cela n’a pas empêché Trump d’amplifier cette affirmation quelques heures plus tard auprès d’une audience estimée à quelque 67 millions de téléspectateurs américains, en plus des téléspectateurs en ligne.
D’autres républicains ont partagé des messages similaires à ceux de Vance. Parmi eux, le sénateur du Texas Ted Cruz, qui a publié une photo de chatons avec une légende disant de voter pour Trump « pour que les immigrants haïtiens ne nous mangent pas ».
Dans le cadre de la désinformation, une affaire de cruauté envers les animaux survenue à Canton, dans l’Ohio, a été reprise. La femme accusée est une Afro-Américaine née dans l’Ohio et qui souffre de problèmes de santé mentale.
Statut juridique temporaire pour certains Haïtiens
Springfield a connu un afflux d’immigrants haïtiens.
Le mois dernier, l’administration Biden a accordé le statut juridique temporaire à environ 300 000 Haïtiens déjà présents aux États-Unis, car les conditions en Haïti sont considérées comme dangereuses pour leur retour. Le gouvernement haïtien a étendu l’état d’urgence à l’ensemble du pays en raison de la violence endémique des gangs.
Le gouverneur Mike DeWine a tenu une conférence de presse mardi et a déclaré qu’il enverrait des policiers d’État à Springfield pour aider les forces de l’ordre locales à faire face aux problèmes de circulation, tout en réservant 2,5 millions de dollars américains sur deux ans pour fournir davantage de soins de santé primaires aux familles d’immigrants.
DeWine a refusé de répondre à ces fausses allégations, laissant le soin aux autorités locales de faire des commentaires. Mais il a exprimé à plusieurs reprises son soutien au peuple d’Haïti, où sa famille gère depuis longtemps une organisation caritative.
Cet afflux a donné lieu à des rumeurs répandues en personne lors de réunions politiques locales, un homme offrant un récit non fondé selon lequel des Haïtiens chassent le canard dans les parcs locaux.
Dans sa publication Facebook de jeudi, la ville a fermé tout commentaire sur l’affaire.
Au cours de l’histoire des États-Unis, les communautés d’immigrés ont été victimes de mépris et d’insultes liées à la nourriture, des Chinois de la côte ouest à la fin du XIXe siècle, lorsqu’ils ont commencé à arriver en grand nombre aux États-Unis, aux autres communautés asiatiques et insulaires du Pacifique comme les Thaïlandais ou les Vietnamiens, au cours des décennies suivantes. L’année dernière encore, un restaurant thaïlandais en Californie a été victime de ce stéréotype, ce qui a provoqué une telle vague de vitriol immérité que le propriétaire a dû fermer ses portes et déménager ailleurs.
Au cours des deux dernières années, de nombreux incidents très médiatisés ont eu lieu aux États-Unis, dans lesquels des entreprises et des institutions ont reçu des menaces liées à des questions controversées ou à des événements mondiaux.
Plusieurs hôpitaux qui proposent des programmes de soins liés au genre ont signalé avoir reçu des menaces de violence accrues par téléphone et par courrier électronique peu de temps après des publications des Libéraux de TikTok et d’autres comptes opposés au traitement des jeunes transgenres.
De plus, les synagogues et autres institutions des communautés juives des États-Unis et du Canada font l’objet de menaces depuis qu’Israël a répondu par une campagne militaire vigoureuse et meurtrière à une attaque menée par des militants du Hamas le 7 octobre.
