Des chercheurs déplacent des objets flottants avec des ondes sonores


La configuration expérimentale, avec des haut-parleurs et des microphones à chaque extrémité d’un réservoir d’eau, et des objets à diffusion verticale au centre. Crédit : EPFL/LWE CC-BY-SA 4.0

Des chercheurs de l’EPFL ont réussi à diriger des objets flottants autour d’un parcours d’obstacles aquatique en utilisant uniquement des ondes sonores. Leur nouvelle méthode inspirée de l’optique est très prometteuse pour les applications biomédicales telles que l’administration ciblée non invasive de médicaments.

En 2018, Arthur Ashkin a remporté le prix Nobel de physique pour avoir inventé la pince optique : des faisceaux laser pouvant être utilisés pour manipuler des particules microscopiques. Bien qu’utiles pour de nombreuses applications biologiques, les pinces optiques nécessitent des conditions statiques extrêmement contrôlées pour fonctionner correctement.

“Les pinces optiques fonctionnent en créant un “hotspot” lumineux pour piéger les particules, comme une balle tombant dans un trou. Mais s’il y a d’autres objets à proximité, ce trou est difficile à créer et à déplacer”, explique Romain Fleury, responsable de le Laboratoire d’Ingénierie des Ondes de la Faculté d’Ingénieurs de l’EPFL.

Fleury et les chercheurs postdoctoraux Bakhtiyar Orazbayev et Matthieu Malléjac ont passé les quatre dernières années à essayer de déplacer des objets dans des environnements dynamiques et incontrôlés à l’aide d’ondes sonores. En fait, la méthode de l’équipe – la mise en forme de l’impulsion des vagues – est totalement indifférente à l’environnement d’un objet ou même à ses propriétés physiques. Toute l’information requise est la position de l’objet, et les ondes sonores font le reste.

« Dans nos expériences, au lieu de piéger les objets, nous les poussions doucement, comme on guiderait une rondelle avec un bâton de hockey », explique Fleury.

La méthode non conventionnelle a été publiée dans Physique naturelle en collaboration avec des chercheurs de l’Université de Bordeaux en France, de l’Université Nazarbayev au Kazakhstan et de l’Université technologique de Vienne en Autriche.

Si les ondes sonores sont le bâton de hockey dans l’analogie de Fleury, alors un objet flottant comme une balle de ping-pong est la rondelle. Dans les expériences du laboratoire, la balle flottait à la surface d’un grand réservoir d’eau et sa position était capturée par une caméra aérienne. Des ondes sonores audibles émises par un réseau de haut-parleurs à chaque extrémité du réservoir dirigeaient la balle le long d’une trajectoire prédéterminée, tandis qu’un deuxième réseau de microphones « écoutait » le feedback, appelé matrice de diffusion, lorsqu’il rebondissait sur la balle en mouvement.

Cette matrice de diffusion, combinée aux données de position de la caméra, a permis aux chercheurs de calculer en temps réel l’impulsion optimale des ondes sonores lorsqu’elles poussaient la balle sur sa trajectoire.






Crédit : Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne

“La méthode est ancrée dans la conservation de la quantité de mouvement, ce qui la rend extrêmement simple et générale, et c’est pourquoi elle est si prometteuse”, explique Fleury.

Il ajoute que la mise en forme de l’impulsion des ondes s’inspire de la technique optique de mise en forme du front d’onde, utilisée pour focaliser la lumière diffusée, mais il s’agit de la première application du concept au déplacement d’un objet. De plus, la méthode de l’équipe ne se limite pas à déplacer des objets sphériques le long d’un chemin : ils l’ont également utilisée pour contrôler les rotations et pour déplacer des flotteurs plus complexes comme un lotus en origami.

Imiter les conditions à l’intérieur du corps

Une fois que les scientifiques ont réussi à guider une balle de ping-pong, ils ont réalisé des expériences supplémentaires avec des obstacles fixes et mobiles conçus pour ajouter de l’hétérogénéité au système. Le fait de faire naviguer avec succès la balle autour de ces objets diffusants a démontré que la mise en forme de l’impulsion des ondes pouvait bien fonctionner même dans des environnements dynamiques et non contrôlés comme le corps humain. Fleury ajoute que le son est un outil particulièrement prometteur pour les applications biomédicales, car il est inoffensif et non invasif.

“Certaines méthodes d’administration de médicaments utilisent déjà des ondes sonores pour libérer des médicaments encapsulés. Cette technique est donc particulièrement intéressante pour pousser un médicament directement vers les cellules tumorales, par exemple.”

La méthode pourrait également changer la donne pour les applications d’analyse biologique ou d’ingénierie tissulaire où la manipulation des cellules en les touchant entraînerait des dommages ou une contamination. Fleury voit également des applications de l’impression 3D pour façonner l’impulsion des vagues, par exemple pour disposer des particules microscopiques avant de les solidifier en un objet.

En fin de compte, les chercheurs pensent que leur méthode pourrait également fonctionner en utilisant la lumière, mais leur prochain objectif est de faire passer leurs expériences basées sur le son de l’échelle macro à l’échelle micro. Ils prévoient de faire des expériences au microscope, en utilisant des ondes ultrasonores pour déplacer les cellules.

Plus d’information:
Bakhtiyar Orazbayev et al, Mise en forme de l’impulsion d’onde pour les objets en mouvement dans des milieux hétérogènes et dynamiques, Physique naturelle (2024). DOI : 10.1038/s41567-024-02538-5

Fourni par l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne

Citation: Des chercheurs déplacent des objets flottants avec des ondes sonores (25 juin 2024) récupéré le 25 juin 2024 sur

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