« FERMETURE – Nous sommes au regret de ne pas pouvoir continuer l’aventure FAIR-PLAY-SPORT. Merci de la confiance que vous nous témoignez depuis des années. Nous vous souhaitons un bel été, nous nous retrouverons à la rentrée dans un autre lieu. » La formule, claire et limpide, a mis fin sur les réseaux sociaux aux espoirs de tous ceux qui s’étaient unis dans la mobilisation pour sa survie. Le dojo de la Cité Champagne a baissé son rideau et personne ne pourra rien y faire. À moins qu’il revive un peu plus loin. Et avec le même état d’esprit.
Depuis quelques semaines, lorsque son propriétaire a exigé que tous les arriérés de paiement soient versés, Jean-Pierre Vignau, 77 ans, avait senti la tristesse l’envahir. Ce dojo, le sensei l’avait construit de ses propres mains au siècle dernier pour dispenser ses cours de karaté aux enfants et aux adultes de ce quartier populaire, à des tarifs défiant toute concurrence. Un vrai lien social dans lequel tout le monde s’était retrouvé lorsqu’il a fallu monter au créneau.
12 300 euros récoltés alors que 90 000 étaient nécessaires
Avec seulement 12 300 € de collecte (alors que 90 000 étaient nécessaires), et malgré des centaines de signatures et l’appui de la mairie du XXe arrondissement, le combat était de toute manière perdu d’avance. La faute à une pandémie ravageuse. Le dépôt de bilan a donc été acté mais il n’y aura pas de redressement judiciaire.
À son retour de stage dans le sud du pays, Jean-Pierre Vignau va prendre rendez-vous avec l’agent immobilier mandaté par le propriétaire (qui vit en Nouvelle-Calédonie) pour lui remettre les clés. Les parents qui ne sont pas encore au courant trouveront porte fermée en amenant leurs enfants à la rentrée. À moins que, comme l’indique le message, une autre solution soit trouvée d’ici-là.
L’une des idées lancée par plusieurs personnes du collectif de soutien est de trouver une autre salle, si possible pas très loin, avec les mêmes professeurs. « Le quartier a besoin de ces spécialistes reconnus dans leur discipline, insiste Hélène, dont le fils suivait les cours de l’ancien cascadeur maître des lieux. Il faut essayer de les sauver. Ce n’est pas le lieu qui compte. C’est ce que l’on y fait. »

Professeur de boxe et de grappling (lutte au sol) dans l’ancienne structure, Charly Hoang a de son côté ressorti un projet vieux de deux ans qu’il comptait mettre en place… dans l’Yonne. « L’idée est d’avoir une salle ouverte même pendant les vacances afin que les jeunes n’errent pas dans les rues et fassent des bêtises, prévient le chef cuisinier. Mon souci est aussi de garder l’âme de ce dojo, et de ne pas perdre les petits. » Des discussions sont en cours avec la municipalité. Le projet, s’il est encore loin d’être abouti, à donc au moins le mérite d’exister.
Jean-Pierre Vignau, lui, n’abandonnera jamais. « C’est la merde ! Mais je veux continuer à donner des cours et à trouver une salle. Je ne peux pas laisser les enfants orphelins », conclut-il.