La Cour des droits de l'homme reproche à la France la tactique de « turbulence » de la police lors des manifestations de 2010


Strasbourg (AFP) – La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a déclaré jeudi la France coupable d'avoir utilisé illégalement une tactique policière controversée pour encercler des manifestants lors d'une manifestation en 2010.

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La méthode, connue sous le nom de « kettling », consiste à ce que la police boucle des zones pour contenir des groupes de manifestants dans un espace restreint – parfois pendant des heures – jusqu'à ce que, de l'avis de la police, ils ne puissent plus causer de troubles.

La police a utilisé cette tactique lors d'une manifestation en 2010 à Lyon, dans le sud-est de la France, contre la réforme des retraites sous le président de l'époque Nicolas Sarkozy – qui a déclenché de violents affrontements entre manifestants devant la police dans plusieurs villes françaises.

Tout en reconnaissant qu'il y avait de bonnes raisons de boucler la place Bellecour de la ville pour empêcher la propagation des troubles, le tribunal a également déclaré qu'il n'existait à l'époque aucune base légale pour le faire.

La France a donc violé deux dispositions clés de la Convention européenne des droits de l’homme : la liberté de circulation et la liberté de réunion et d’association, a-t-elle jugé.

“Le tribunal a conclu que l'utilisation par la police de la technique du kettling n'était pas, à l'époque des faits, “prescrite par la loi””, indique le communiqué.

Le ministère français de l'Intérieur a depuis publié des instructions nationales de maintien de l'ordre public qui légalisent la pratique du kettling, a indiqué le tribunal.

L'avocat des plaignants, Patrice Spinosi, a qualifié le verdict de “victoire” car il démontrait que le kettling était “illicite” à l'époque.

Pas de chèque en blanc

Il a déclaré que la base juridique établie par la suite pour cette pratique n'était “pas un chèque en blanc pour la police”, qui pourrait toujours être récusée si elle utilisait cette tactique “sans discernement”.

L'affaire a été déposée par une douzaine de participants à la manifestation du 21 octobre 2010, qui faisait partie d'une série de protestations parfois violentes contre le projet de réforme des retraites.

Jusqu'à 600 personnes se sont rassemblées place Bellecour pour la manifestation, dont les autorités avaient été prévenues.

Deux heures après le début de la manifestation, la police a mis en place des mesures de confinement qui ont été annulées seulement plus de trois heures plus tard, empêchant les personnes se trouvant à l'intérieur du cordon de se joindre à la manifestation.

Plusieurs manifestants ont porté plainte auprès de la justice française, qui a rejeté leur dossier.

Ils ont ensuite porté plainte devant la CEDH en décembre 2021, affirmant que la mesure de kettling avait violé leur liberté de mouvement d'une manière qui n'était pas réglementée par la loi.

Kettling, également connu sous le nom de « corralling », est souvent critiqué pour avoir frappé sans discernement à la fois les manifestants et les passants non-manifestants qui se trouvent au même endroit, les privant souvent d'accès à l'eau, à la nourriture et aux toilettes pendant des heures.

Il est largement utilisé dans le monde entier et a été contesté juridiquement dans plusieurs cas, parfois avec succès.

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