La société américaine de sécurité privée Bancroft Global Development affirme être en pourparlers avec la République centrafricaine sur « ses activités futures », dans le but possible de forcer le groupe de mercenaires russes Wagner à quitter le pays déchiré par une guerre civile qui dure depuis une décennie.
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Bancroft a nié s'être déployé à Bangui, la capitale centrafricaine, mais a déclaré être en contact avec le gouvernement du président Faustin Archange Touadera.
“À partir de juillet, Bancroft s'est mis d'accord sur un cadre pour discuter d'éventuelles activités futures avec le gouvernement centrafricain. C'est tout”, a déclaré un porte-parole dans une déclaration écrite envoyée mardi à l'agence de presse française AFP.
En début de semaine dernière, RFI révélait que des salariés de Bancroft étaient déjà arrivés à Bangui.
“Ils sont là, mais pas encore opérationnels”, a confirmé une source proche du chef de l'Etat, sans donner plus de précisions.
« Diversifier les relations »
La semaine dernière, la station locale Radio Ndeke Luka a diffusé l'enregistrement d'une conférence de presse au cours de laquelle Albert Yaloke Mokpeme, porte-parole de la présidence, a déclaré que son pays menait “un travail pour diversifier ses relations”.
Il a ajouté que la RCA avait appelé des pays comme la Russie et les États-Unis à contribuer à la formation des soldats.
Les États-Unis ont proposé de former les troupes centrafricaines « à la fois sur le sol centrafricain et sur le sol américain », a ajouté Mokpeme.
Mokpeme a refusé de dire si Bancroft était déjà présent en RCA.
“La formation de notre armée reste notre priorité”, a-t-il déclaré à l'AFP. “Je ne suis pas en mesure de parler du fond de l'affaire.”
Les pourparlers de Bancroft avec les autorités centrafricaines interviennent alors que la Russie cherche à maintenir et à étendre son influence en Afrique après la mort d'Evgueni Prigozhin, fondateur du plus grand groupe de mercenaires russes Wagner.
Des troupes françaises aux mercenaires russes
Le président Touadera a fait appel à Wagner en 2018 pour l’aider à former ses forces armées.
Cette décision intervient après la fin d’une opération française de maintien de la paix en RCA en 2016.
La France, qui a colonisé le pays de 1895 à 1960, a commencé à envoyer des troupes en RCA en décembre 2013 pour aider à endiguer une guerre civile qui éclate selon des lignes sectaires. La mission, autorisée par les Nations Unies, était censée renforcer une force de maintien de la paix de l'Union africaine déjà en place.
Mais les troupes internationales ont eu du mal à stabiliser le pays. Une centaine de militaires français sont restés en place après la fin de l’opération après les élections de 2016 et ont finalement été retirés en décembre 2022.
Pendant ce temps, le gouvernement de Touadera avait déjà commencé à embaucher davantage d’agents russes alors que les groupes rebelles avançaient vers la capitale fin 2020.
Wagner s'est alors imposé comme l'un des principaux partenaires sécuritaires de la RCA en échange de contrats lucratifs dans le pays, malgré les allégations de pillages et d'atrocités.
Intérêts américains croissants
Le site Africa Intelligence avait révélé plus tôt qu'une délégation de Bancroft avait été secrètement reçue par le président centrafricain en septembre, en vue d'un éventuel déploiement.
Les analystes militaires affirment que les pays occidentaux envisagent de nouvelles opportunités en Afrique alors que les autorités russes cherchent à réorganiser Wagner.
Colin Clarke, du groupe de réflexion Soufan Center basé à New York, spécialisé dans la sécurité, a déclaré à l'AFP que la rivalité entre les puissances de la région allait s'intensifier au cours de l'année à venir.
« Nous espérons que l’administration Biden prend conscience du fait que les États-Unis doivent se montrer plus en avant au Sahel et dans d’autres régions d’Afrique, compte tenu de la détérioration de la situation sécuritaire », a-t-il déclaré.
Les Etats-Unis cherchent à contester l'influence récemment élargie de la Russie sur le continent africain, selon Lucas Webber, co-fondateur du site spécialisé Militant Wire.
“Bancroft est devenue une force de sécurité privée importante et est considérée comme un partenaire fiable à cet effet”, a-t-il déclaré à l'AFP.
L'entreprise est en partie financée par le Département d'État américain, mais insiste sur le fait qu'elle ne représente pas Washington.
(avec AFP)