Trois des principaux candidats aux élections législatives françaises se sont rencontrés lors d’un débat télévisé mardi 25 juin. Nous passons en revue les principaux points politiques soulevés.
Plus de 5,5 millions de téléspectateurs ont regardé le premier ministre Gabriel Attal, le président du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella et Manuel Bompard de La France Insoumise (LFI), représentant du Nouveau Front populaire (NFP), s’affronter sur des questions allant du pouvoir d’achat à l’immigration.
M. Bardella et M. Bompard ont tous deux exhorté les électeurs français à « tourner la page » du macronisme et à voter pour leur parti lors des élections des 30 juin et 7 juillet.
Questions clés
Pouvoir d’achat
“On peut agir sur le pouvoir d’achat”, a affirmé M. Bardella, qui se présente comme “le premier ministre du pouvoir d’achat”. Il a réitéré la promesse du RN de baisser la TVA sur l’énergie de 20% à 5,5%.
M. Attal a répliqué, se demandant combien coûteraient les baisses d’impôts du RN et comment elles seraient financées.
“Je ne veux pas promettre la lune”, a déclaré M. Attal, 35 ans, se présentant comme quelqu’un qui tiendrait fermement les rênes de l’économie et du budget français, comparé aux grosses dépenses promises par ses rivaux. Il a promis des mesures pour « gagner plus et dépenser moins ».
M. Bompard, 38 ans, a réclamé une augmentation des salaires et la fixation du salaire minimum net (SMIC) à 1.600 euros et a déclaré à Attal qu’il était “mal placé pour donner des leçons d’économie” au vu de son bilan jusqu’à présent.
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Impôts
M. Bardella a réitéré le projet du RN de supprimer l’impôt sur le revenu des moins de 30 ans, ce à quoi M. Attal a demandé si M. Bardella, 28 ans, allait s’exonérer d’impôts.
M. Attal a déclaré que sa « règle d’or » serait de ne pas augmenter les impôts et qu’il supprimerait les frais de notaire pour les primo-accédants sur les maisons d’une valeur inférieure ou égale à 250 000 €.
M. Bompard a appelé à des augmentations d’impôts pour les 8 % des salariés les plus riches, ajoutant que 92 % des personnes paieraient « le même impôt ou moins ».
🗣️ “Avec nous, les Français ont la certitude que nous n’augmentons pas les impôts” promet @GabrielAttal pour sa conclusion
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Réforme des retraites
Bardella et Bompard ont déclaré qu’ils annuleraient la réforme controversée des retraites du gouvernement, qui a relevé l’âge de la retraite à 64 ans.
Mais le leader du RN, Bardella, a fini par suggérer qu’une personne qui commençait à travailler à 24 ans prendrait sa retraite à 66 ans. Ce que de nombreux médias ont considéré comme contradictoire avec les déclarations précédentes.
Doubles nationaux
Le Premier ministre Attal a critiqué le projet du RN visant à interdire aux binationaux certains postes « sensibles » du gouvernement, affirmant que « 3,5 millions de Français binationaux se sentaient insultés et humiliés » par cette proposition.
M. Bardella a défendu le projet, remettant à nouveau en question la perspective de voir des Franco-Russes occuper des postes sensibles. M. Attal a répliqué en mentionnant Tamara Volokhova, conseillère en sécurité et défense du groupe ID du RN au Parlement européen, qui est franco-russe. Les Échos dit que Bardella était « piqué et incapable de se justifier ».
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Soins de santé
Sur la question des déserts médicaux, M. Attal a déclaré qu’il fallait davantage de médecins, mais a également demandé que certaines tâches de soins soient confiées à d’autres professionnels de santé afin de libérer le temps des médecins.
M. Bompard a appelé à ce que « tous les services publics essentiels » ne se trouvent pas à plus de 30 minutes du domicile d’une personne, tandis que Bardella a déclaré que les médecins devraient être autorisés à continuer à travailler après leur retraite.
Violence chez les jeunes
M. Bardella a déclaré que le RN supprimerait les avantages accordés aux parents de récidivistes, tandis que M. Bompard a déclaré que le NFP consacrerait davantage de recours à la police de proximité.
Environnement
M. Bompard a critiqué le gouvernement pour avoir réduit son budget de transition écologique, tandis que M. Attal a défendu la réduction des gaz à effet de serre et le projet d’accorder des subventions aux particuliers pour mieux isoler leur logement.
M. Bardella a décrit le projet visant à mettre fin à la vente de voitures neuves à moteur à combustion en 2035 comme quelque chose qui relève d’une « société à la cubaine ».
Immigration
M. Bardella a promis de « réduire considérablement l’immigration de masse » et de supprimer le droit automatique à la citoyenneté française pour les personnes nées en France. « Sur une planète comptant huit milliards d’habitants et la bombe démographique à retardement qu’est l’Afrique, cela n’est plus possible », a-t-il déclaré.
M. Bompard a défendu l’immigration, affirmant que « nous avons construit la France sur des vagues d’immigration » et soulignant l’héritage immigré italien et algérien de M. Bardella. Il a déclaré que « les immigrés ne coûtent pas d’argent, mais en rapportent », affirmant que l’immigration a rapporté 10 milliards d’euros par an à la France au cours de la dernière décennie.
🗣️ “On a construit la France grâce aux vagues d’immigration” défend @mbompard
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Le grand problème manquant
Les affaires étrangères étaient largement absentes du débat. Un volet sur le « rôle de la France dans le monde » était prévu, mais le trio a manqué de temps. Le Monde a noté qu’il n’y avait « pas un mot » sur la guerre en Ukraine, sur l’UE ou sur le conflit Israël-Hamas.
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Quelle a été la réaction ?
France
Le Monde a déclaré que le débat ressemblait à une « dispute entre comptables » axé sur la finance, et qu’il « passait à côté des enjeux d’une élection majeure ».
Magazine d’actualité Le Nouvel Obs Selon lui, la « grande surprise » de la soirée a été la prestation de Manuel Bompard, « souriant, calme et… en pleine maîtrise ». Le principal perdant de la soirée était Jordan Bardella, qui s’est retrouvé « dans les cordes » – notamment sur les questions de retraite et de double nationalité. Attal s’est montré « incisif et percutant », même s’il était parfois incapable de justifier certaines politiques, selon le magazine.
“Hier, le RN a promis d’abroger la réforme des retraites à 64 ans. Aujourd’hui, il défend la retraite à 66 ans. Le programme de Bardella, c’est le redressement national”, a tweeté le député socialiste Boris Vallaud.
La retraite à 60 ans sur TikTok et à 66 ans IRL 🤡 !#LeDébatTF1 pic.twitter.com/j56WCIrqs2
— Yaël Braun-Pivet (@YaelBRAUNPIVET) 25 juin 2024
“Retraite à 60 ans sur TikTok et 66 IRL (dans la vraie vie)”, a tweeté l’ancienne présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, visant la popularité de Bardella auprès d’une partie des jeunes et de nombreux abonnés sur les réseaux sociaux.
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Presse internationale
CNN a déclaré que le débat avait été « parfois chaotique » et a noté que la plupart des coups de poing « n’avaient pas réussi à aboutir », tandis que France 24 a déclaré qu’il s’agissait d’une rencontre « de mauvaise humeur » et « parfois meurtrière ».
Le FT a qualifié le débat de « fougueux » et a noté que les candidats avaient manqué de temps pour discuter des questions internationales.
Qui a gagné le débat ?
Le mercredi matin BFMTV a conclu qu’il n’y avait « pas de grand gagnant » entre les trois, et qu’aucun candidat ne devançait le peloton.
“Aucun des trois n’était entièrement mauvais, mais aucun n’était entièrement rassurant non plus”, a déclaré Philippe Moreau-Chevrolet, expert en communication politique. La Dépêche. “Nous sortons du débat plus préoccupés par la situation du pays qu’autre chose.”
RTL a déclaré que M. Bompard s’est imposé en matière d’immigration, où il a su “éviter de trop tomber dans la caricature” et a rappelé qu’en France, un travailleur sur dix est immigré.