Le Tour n’était plus passé à l’Alpe-d’Huez depuis 2018 et cela s’est senti dans les pentes de la célèbre station alpestre et de ses 21 virages qui mènent au paradis. L’attente a généré une ambiance extraordinaire. En 2018, cette dernière avait été décevante. Les organisateurs avaient décidé de juguler un peu l’affluence dans les virages où certains débordements avaient été constatés auparavant. Mais, leur système de filtration s’était révélé trop rigoureux. Et de mémoire de suiveurs, la montée de l’Alpe 2018 avait été terne sur les bords de route.
Mais cette fois, on peut dire que l’Alpe d’Huez est redevenue ce stade à ciel ouvert où certains virages ressemblent à des kops de stade de football. En tout début d’après-midi, les spectateurs arrivaient encore par centaines à pied, chaises de camping et sacs de nourriture à la main. En raison de l’affluence dingue, l’ascension a été laissée ouverte jusqu’après 14h alors qu’il était prévu qu’elle soit fermée à 10h. Si les premiers virages, numérotés de 21 à 1 dans le sens de la montée, semblent bien calmes, tout se corse quelques hectomètres plus haut.
À chaque virage son folklore
Au détour du virage 16, des Anglais déguisés en soldats de sa majesté, entraînent le reste du public dans une danse saccadée sur fond de musique techno. Encore plus haut, si des cyclotouristes suent en grimpant dans les pentes, d’autres liquides plus alcoolisés descendent dans les gosiers. Ou plutôt, sont descendus depuis longtemps. Les visages rougeauds et pas uniquement à cause du soleil entament des chansons paillardes pendant que des sonos crachent du Patrick Sébastien.
En tournant dans certains virages, il est impossible de passer la seconde vitesse. Les vitres fermées permettent d’éviter que les jets de liquide de toute sorte venus de gobelet pénètrent dans l’habitacle. Contrairement aux autres ascensions de grands cols sur le Tour où les spectateurs sont de tous les âges, la montée de l’Alpe d’Huez semble réservée aux plus jeunes. On peut parfois la confondre avec une boîte de nuit. Mais la soirée mousse est plutôt lancée avec celle de la bière. Arrive enfin le virage 7 appelé depuis longtemps virage des Néerlandais. Et on n’y voit que du orange pressé d’alcool et de passion. Et ce n’est pas la performance de la formation néerlandaise Jumbo-Visma, avec sa prise de pouvoir du maillot jaune, la veille qui va calmer les esprits. Bière en main, cris de moins en moins articulés, les Oranje beuglent, sans agressivité.
Au virage 5, comme une contre-soirée, les Danois et les Norvégiens se sont regroupés. Le taux d’alcoolémie semble moins élevé. Mais on ne jurerait pas qu’il est à zéro.
Certains profitent de la montée pour passer des messages personnels. À l’image de cette jeune iséroise qui a peint un mot d’anniversaire à son amoureux qui pilote une voiture de suiveur sur le Tour. Elle a aussi revêtu un tee-shirt où le nom de son homme s’affiche. Alcool, Amour, Affluence. La Montée de l’Alpe valait bien un triple A ce jeudi.