Trois kilomètres à plus de 10 % de dénivelé, onze au total à 9,2 % de moyenne… L’Alpe d’Huez, apothéose de l’étape du 14 juillet, est dans toutes les têtes mais c’est un autre col, bien plus coriace, qui fait trembler le peloton tout entier. Ce mercredi, il sera un peu plus de 16 heures quand se présentera le col du Granon. La première alerte rouge de cette séquence alpestre.
Le Tour de France ne s’est aventuré qu’une seule fois dans cette pente piégeuse même si très régulière. Nous sommes en 1986 et Charly Mottet fait partie des explorateurs de l’extrême. « J’ai le souvenir d’un col très difficile. Moi, ça allait, mais les kilomètres se font plus longs pour ceux qui souffrent de l’altitude. Ça a changé mais à l’époque, c’était une route granuleuse qui ne rendait pas grand-chose. Je serai étonné que Pogacar n’y tente rien demain. S’il n’attaque pas, c’est qu’il n’a pas de bonnes jambes. Au pied du Granon, on ne s’en sort pas si on est moins bien, on ne peut pas se cacher comme en plaine. »

Juge de paix, ce col peut l’être d’autant plus que l’arrivée se fera au sommet, c’est-à-dire à 2 413 m d’altitude. Jeannie Longo répond toute heureuse à nos questions sur cette pointe qu’elle aussi a gravie en 1986. Avant de s’y imposer à cinq reprises lors du Défi du Granon, organisé chaque été le 15 août. « On n’a pas de répit dans cette ascension. Un peu comme dans le Mont Ventoux côté chalet Reynard. Il n’y a pas de virage plat, décrypte-t-elle. Je ne sais pas si je peux leur donner des conseils, vu comment ça monte de nos jours, mais en tout cas, il faut bien se rafraîchir. Pas forcément boire des tonnes parce qu’on risque de gonfler mais plutôt en se donnant des coups d’éponge régulièrement. Le plus important, c’est de s’arroser et de se rafraîchir plus que de s’hydrater. »
« En cas de vent de face, vous souffrez jusqu’au bout »
Jordan Sarrou, champion du monde de VTT cross-country en 2020, a ses habitudes. Lorsqu’il va visiter de la famille dans le coin, il se coltine le Granon pour « se tester ». Il y détient le deuxième meilleur temps sur l’application Strava, avec un chrono de 39 minutes et 12 secondes, soit un effort à 17,2 km/h. « Dès le pied du col, c’est tout de suite raide. Cela dépend de la direction du vent mais les meilleurs grimpeurs pourraient faire la différence très vite. Le début du deuxième tiers est vraiment terrible avec des lacets bien raides. Sur la fin, ça se calme un peu mais en cas de vent de face, vous souffrez jusqu’au bout. »
L’arrivée, justement, parlons-en. Si le Granon ne s’est pas déjà imposé parmi les rendez-vous mythiques de la Grande Boucle, c’est parce qu’il est impossible d’y descendre par l’autre face, que ce soit en voiture ou à vélo. S’y dresse en quelque sorte un point de non-retour donc, une belle définition de ce qui attend les coureurs.