Voir la chambre d’un soldat français de la Première Guerre mondiale, inchangée depuis 1918


Les parents en deuil d’un sous-lieutenant de 21 ans tué en 1918 ont gardé la chambre de leur fils telle qu’elle était lors de sa dernière visite à la maison – et ont demandé dans leur testament que la pièce reste intacte pendant 500 ans.

Mais après une récente vente, les nouveaux propriétaires de la maison de Bélâbre dans l’Indre ont décidé qu’ils ne pouvaient plus garder la pièce telle qu’elle était, en raison de gros travaux en cours sur la maison et parce que les acariens avaient commencé à détruire les vêtements en laine.

La tunique mitée (Crédit : Michel Jouanneau)

“C’est remarquable de pouvoir se promener dans cette salle figée dans le temps”, Michel Jouanneau, conseiller municipal chargé de veiller sur les objets jusqu’à leur placement dans un musée, où la salle sera reconstituée.

“Il y a évidemment un profond sentiment de tristesse face à la perte du jeune homme et au chagrin de sa famille, mais on a aussi une idée du genre de garçon qu’il était – manifestement passionné par les chevaux à cause des rênes, du fouet et autres harnachements, et il aimait aussi y lire avec de nombreux livres, comme les romans de Hugo.

Un grand bougeoir est en place, car la maison n’avait pas d’électricité en 1918. D’autres objets personnels, comme son dentifrice, ses pipes, sa boîte à tabac, ses couteaux, ses montres et son stylo, se trouvent également dans la pièce, ainsi que des manuels scolaires, des livres d’étude et albums de photos de famille.

Une vue de la salle (Crédit : Michel Jouanneau)

Le poilu (surnom donné aux soldats français pendant la guerre) s’appelait Hubert Rochereau, et il fut formé à l’école d’officiers de Saint-Cyr. Sa plus belle casquette d’uniforme à plumes est toujours sur son lit – avec un casque allemand capturé.

Il fut tué par un fragment d’obus lors de la bataille du Mont Kemmel en Belgique le 26 avril 1918.

L’une des lettres qu’il avait écrites en 1917 après avoir été au front pendant plus d’un an se trouvait dans la pièce. Il y réfléchissait sur tous les morts, affirmant que leurs corps formaient une barrière entre la France et les Barbares.

La veille de sa mort, il a écrit une courte note, assurant à ses parents qu’il allait bien et qu’il n’avait besoin de rien, que tout allait bien, et leur disant de ne pas s’inquiéter, écrivant qu’il avait « une confiance illimitée, Dieu et son étoile ».

Portrait d’Hubert Rochereau (Crédit : Michel Jouanneau)

Ses parents, qui dirigeaient une petite entreprise de fabrication de chapeaux, ont été dévastés par sa mort et ont donc gardé la pièce telle qu’elle était lors de sa dernière visite.

À leur mort, la maison fut vendue et les nouveaux propriétaires successifs conservèrent également la pièce, n’y entrant apparemment presque jamais.

La pièce a été rendue publique par les propriétaires de la maison en 2010 et est devenue un centre d’attraction au cours des années commémoratives du centenaire 2014-2018.

Mais ensuite le propriétaire est décédé, la maison a été vendue et les nouveaux propriétaires de la maison, un maison de maître avec jardin, a décidé que la chambre ne pouvait pas être conservée car la propriété nécessite d’importants travaux de rénovation.

“Les testaments des parents d’Hubert Rochereau n’ont aucune valeur légale en la matière, mais les nouveaux propriétaires ne voulaient pas que les objets soient vendus ou séparés, c’est pourquoi ils se sont adressés au conseil et ont demandé si nous pouvions faire quelque chose”, a déclaré M. Jouanneau.

“A cette époque, les articles en laine, comme une tunique d’uniforme, avaient été attaqués par des acariens, et même si les nouveaux propriétaires avaient abandonné les traitements, si rien n’était fait, de nombreux articles dans la pièce ne dureraient plus longtemps.”

Les objets stockés à la mairie ont fait appel à des conservateurs spécialisés pour traiter les matériaux mités et les vers du bois de certains meubles.

Décorations du Sous-lieutenant Rochereau (Crédit : Michel Jouanneau)

On espère que la salle sera ensuite recréée dans un nouveau musée qui, en plus de reproduire la salle, explorera l’impact de la guerre.

« Il existe de nombreux monuments aux morts de la Première Guerre mondiale dans le nord et l’est de la France, mais beaucoup moins dans le reste du pays, comme ici dans le Berry, alors qu’en France presque toutes les communes, si petites soient-elles, ont vu des hommes tués et une société bouleversée, » a déclaré M. Jouanneau.

« Nous pensons qu’un nouveau mémorial au centre de la France présente de l’intérêt. Montrer la chambre de ce jeune officier, élevé dans la bourgeoisie provinciale au début du XXe siècle et formé comme d’autres au « besoin de vengeance » après la guerre de 1870, peut avoir beaucoup d’intérêt patrimonial et pédagogique.

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