La France a retrouvé sa place de premier exportateur d’électricité en Europe en 2023 – loin devant la Suède et la Norvège – grâce à sa stratégie nucléaire. Les problèmes de maintenance ont entraîné en 2022 une baisse historique de la production, la France important de l’électricité pour la première fois depuis plus de 40 ans.
Publié le:
3 minutes
Avec 50,1 térawattheures (TWh) d’exportations nettes d’électricité en 2023 vers ses voisins européens, la France retrouve sa place de premier exportateur – détenue par la Suède en 2022.
C'est ce que révèlent les données du cabinet d'analyse S&P Global Commodity Insights, publiées par le journal. Les Échos.
En 2023, la Suède et la Norvège, deux pays régulièrement en tête du classement grâce à leur abondante production hydroélectrique, ont réalisé respectivement 28,6 TWh et 17,3 TWh d'exportations nettes.
L'Espagne, qui dépend de l'énergie solaire et éolienne, arrive quatrième avec 13,9 TWh d'exportations nettes.
En raison de problèmes de corrosion détectés sur plusieurs réacteurs nucléaires fin 2021, la France a été contrainte d'importer de l'électricité pendant la quasi-totalité de 2022, ce qui n'était pas arrivé depuis 42 ans.
Avec le redémarrage des réacteurs, la production nucléaire de l'énergéticien national EDF est passée à 320,4 TWh en 2023, contre 279 TWh en 2022, un niveau historiquement bas depuis 1988.
Importations allemandes
Au total, les voisins européens comme l'Allemagne ont pu bénéficier “plus facilement et à moindre coût” de l'offre excédentaire de la France, a déclaré Glenn Rickson, analyste en électricité chez S&P Global Commodity Insights, à l'agence de presse française AFP.
L’Allemagne a importé 10 TW en 2023, une première depuis 2002.
Cette situation s'explique par l'abandon des trois dernières centrales nucléaires en Allemagne, même si elles ne représentaient que 6 pour cent de l'électricité produite dans le pays.
Leur absence a de quoi créer quelques tensions dès que le vent tombe dans les parcs éoliens, a expliqué à l'AFP Emeric de Vigan, vice-président chargé des marchés de l'électricité chez Kpler.
Pour d’autres experts, la baisse des exportations allemandes d’électricité est avant tout une question de prix : l’Allemagne inondait ses voisins d’électricité bon marché produite à partir du charbon, électricité qui est désormais plus chère en raison du prix plus élevé du CO2.
“Nous espérons que l'Allemagne maintiendra sa position d'importateur dans un avenir proche, d'autant plus qu'un certain nombre de centrales au charbon et au lignite devraient fermer en 2024”, a déclaré Rickson.
Le mix énergétique européen
Le parc français de 56 réacteurs nucléaires – qui fournit au pays 70 pour cent de son électricité – a reçu un coup de pouce après que les États membres de l'UE ont récemment convenu que l'énergie atomique devrait faire partie du mix énergétique du bloc à l'avenir.
Son inclusion dans une réforme du marché énergétique de l'UE, qui passe d'une dépendance aux combustibles fossiles à un marché plus vert et plus renouvelable, a souligné à la fois les efforts de lobbying de Paris et l'urgence en matière de sécurité énergétique suscitée par la guerre de la Russie en Ukraine.
En décembre, la France a signé un mémorandum de coopération nucléaire avec la Suède. Stockholm, comme Paris, mise sur le nucléaire pour atteindre ses objectifs climatiques.
Ce mémorandum “nous permettra de resserrer nos liens sur la question du nucléaire”, a déclaré l'ancienne ministre française de l'Energie, Agnès Pannier-Runacher, après avoir signé le document avec son homologue suédoise, Ebba Busch.
L’Allemagne a répondu à ce geste en affirmant que les sources d’énergie renouvelables devraient plutôt être prioritaires.
Le ministre allemand de l'économie et de l'action climatique, Sven Giegold, a déclaré en décembre que « nous avons besoin de ressources très flexibles et supplémentaires, ce qui signifie que jusqu'à présent, la technologie nucléaire n'est pas prête à répondre à ces besoins ».
Il a également exprimé ses inquiétudes quant au fait que les secteurs nucléaires en France et dans d'autres pays bénéficient de subventions publiques, alors que l'Allemagne est confrontée à une compression des dépenses en raison d'une décision de justice qui mine son budget.
“Cela doit être contrôlé pour éviter des conséquences négatives” pour le marché unique de l'UE, a déclaré Giegold.
(avec AFP)