La France devrait envisager d'infliger des amendes aux personnes qui ne se présenteraient pas à un rendez-vous chez le médecin, a confirmé le nouveau Premier ministre Gabriel Attal.
S'exprimant devant le Parlement, M. Attal a déclaré que les rendez-vous médicaux manqués coûtaient aux médecins « des millions d'heures ». “C'est un principe simple : si vous avez un rendez-vous médical et que vous ne vous présentez pas, vous paierez”, a-t-il expliqué.
On estime que 6 à 10 % des rendez-vous sont manqués chaque année, selon les chiffres de l'Académie de médecine et du Conseil national de l'ordre des médecins. Cela équivaut à 27 millions de rendez-vous manqués que d’autres patients auraient pu utiliser.
Une telle pénalité a été qualifiée de «taxe lapin' (« taxe sur les lapins ») en français. Cela vient de l'expression « poser un lapin », qui signifie « se lever (quelqu'un) » ou ne pas se présenter.
Pour l’instant, M. Attal n’a pas révélé plus de détails sur sa mise en œuvre.
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Négociations en cours
Certains médecins et sénateurs réclament depuis longtemps une telle mesure.
La sénatrice Corinne Imbert (Les Républicains, Charente-Maritime) a mené campagne lors du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, en appelant à ce que le montant soit « versé directement par l'assuré à l'Assurance maladie, prélevé sur son compte bancaire, ou récupérées par l’Assurance maladie sur les prestations futures de toute nature ».
Le gouvernement était favorable au principe mais n'a pas pris de décision au moment où il a été proposé et l'a ajouté à la liste des sujets à discuter avec les médecins dans le cadre des négociations contractuelles en cours.
Le projet de loi prévoyait également que l'amende pourrait être versée aux médecins pour leur absence.
« Bon usage des services de santé »
En octobre, l'Assurance maladie a lancé une campagne mettant en scène les lapins (pour le 'taxe lapin') visant à sensibiliser au « bon usage des services de santé ». Des recherches suggèrent que certaines personnes en France ne sont pas conscientes de l'impact des rendez-vous manqués.
Une étude du cabinet d'études BVA, réalisée pour l'Assurance maladie, révèle que la plupart des Français « estiment faire un usage raisonnable du système de santé ».
Cependant, les statistiques montrent que 42 % déclarent au moins un des éléments suivants au cours des 12 derniers mois :
- Rendez-vous manqués sans annulation préalable
- Oublier de prendre leur carte Vitale pour une consultation
- Aller directement aux urgences sans appeler le 15
- Retarder les vaccinations ou le dépistage.
Difficultés et critiques
Cependant, rembourser les médecins pour le temps perdu n’est peut-être pas simple à mettre en œuvre. L'article R. 4127-53 du Code de la santé publique précise que les médecins ne peuvent être rémunérés que pour les « actes accomplis ». Ceci est également souligné dans le code de déontologie des professionnels de santé.
L'association de patients France Assos Santé a également critiqué cette proposition, affirmant qu'elle transformerait les utilisateurs du système de santé en « boucs émissaires » faute de financement.
Le Royaume-Uni a abandonné un plan similaire l'année dernière
La France n'est pas le seul pays à proposer un tel projet ; Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a abandonné l’année dernière une mesure similaire au Royaume-Uni, bien que l’idée soit l’une de ses promesses de campagne à la direction du parti conservateur.
Il avait précédemment déclaré qu'il était « faux (que) il y ait 15 millions de rendez-vous manqués chaque année » chez les médecins généralistes et les hôpitaux du pays. Cela n’a pas « valorisé correctement les médecins » et « aussi, plus important encore, a privé les gens des soins dont ils avaient un besoin urgent, les faisant attendre inutilement longtemps », a-t-il déclaré.
Il a déclaré que l'introduction d'une amende serait une mesure « dure » mais efficace pour changer le comportement des gens.
Cependant, un porte-parole de Downing Street a déclaré plus tard que même si « le sentiment demeure… (le Premier ministre) a écouté les médecins généralistes et les responsables de la santé et a reconnu que ce n’était pas le bon moment pour faire avancer cette politique ».
Les organismes de santé, dont la British Medical Association, ont également critiqué le plan, affirmant qu’il « aggraverait les choses » et menacerait le principe de « soins gratuits du NHS en cas de besoin ».
Mais la France n'a pas ce même principe et fait déjà payer les consultations aux patients (même si l'essentiel de ces paiements est ensuite remboursé par l'Assurance maladie).
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