Un député nouvellement élu en France est devenu le premier à être répertorié comme «fiche-S” – un statut davantage associé aux terroristes présumés qu’aux fonctionnaires du gouvernement. Alors, qui est le député et qu’est-ce que cela signifie ?
Raphaël Arnault, 29 ans, a été élu député de la première circonscription de Vaucluse (préfecture d’Avignon, Provence-Alpes-Côte d’Azur) sous la bannière de La France Insoumise (LFI), au nom du Nouveau Front populaire (NFP).
Il a battu son adversaire du Rassemblement national au second tour avec 54,98% des voix.
Il a cependant suscité la controverse lors de sa campagne électorale législative pour son «fiche-S” statut et antécédents d’activiste. Ce statut, qui signifie que vous êtes sous surveillance gouvernementale (le “fiche-S« liste de surveillance ») est généralement davantage associée aux terroristes islamiques.
Cette information fait généralement la une des journaux après une tentative d’attentat terroriste ou si une personne figurant sur la liste est arrêtée.
Pourquoi Raphaël Arnault est-il sur la liste ?
M. Arnault figure sur la liste en raison de ses opinions d’extrême gauche et de son activisme antérieur.
Il s’est engagé dans cette cause en 2013, alors qu’il était étudiant en sciences politiques, après la mort de l’activiste antifasciste Clément Méric, tué par des “skinheads” (une bande d’extrême droite). Ce décès a déclenché son militantisme.
Il a dit Les Jours que cela lui avait fait comprendre que « l’on peut mourir aux mains de l’extrême droite ».
En 2018, il participe à la fondation du groupe antifasciste La Jeune Garde, dont il devient le porte-parole. Ce mouvement appelle au « renversement de la société capitaliste » comme seule voie pour combattre et vaincre le fascisme « dans nos quartiers, dans nos universités et sur nos lieux de travail ».
Le groupe a été accusé de violence, après que huit de ses membres ont été inculpés de « violence délibérée fondée sur la race, l’origine ethnique, la nationalité ou la religion », après une agression contre un mineur membre de la Ligue de défense juive.
En février 2022, M. Arnault a été condamné à quatre mois de prison avec sursis pour « violences en réunion », même s’il fait appel de cette décision. Il est accusé d’avoir participé à l’agression d’un homme soupçonné d’appartenir à un groupe d’extrême droite, même s’il s’est déclaré innocent.
Qu’est-ce que l’être fiche-S signifier?
Ayant fiche-S Le statut signifie que vous êtes considéré comme une menace potentielle pour la « sécurité de l’État » et digne d’être sous surveillance policière – ou du moins, que vous êtes connu des autorités pour vos opinions.
Le « S » signifie «sûreté de l’État” (sécurité de l’État). C’est l’une des nombreuses catégories de listes détenues par le gouvernement, sous l’égide de le fichier des personnes recherchées (FPR, « la liste des personnes recherchées »).
Le fichier a été créé en 1969 et compte actuellement plus de 620 000 noms, dont un peu plus de 30 000 figurent sur la liste S.
Il contient des détails tels que l’état civil de la personne, sa photographie, les raisons pour lesquelles elle figure sur la liste et la manière de se comporter si elle est capturée, etc.
Lire aussi : Que signifie le terme « fiche S » en France ?
Ce n’est pas la même chose que le fiches « J » ou « PJ », qui désignent les personnes activement recherchées par la justice ou la police (voir la liste ci-dessous).
Un large éventail de personnes peut figurer sur une liste, notamment des mineurs en fugue, des évadés de prison, des membres d’unités criminelles organisées, des personnes interdites de sortie du territoire, ainsi que des militants politiques ou écologistes. Les détails de la liste peuvent être partagés entre les États membres de l’Union européenne si nécessaire.
Il existe environ 21 catégories différentes, dont :
-
S (sécurité de l’État)
-
R (opposition au séjour en France)
-
TE (opposition à l’entrée en France)
-
AL (personnes mentalement malades)
-
M (mineurs en fugue)
-
V (évadés)
-
J et PJ (enquêtes criminelles) ;
-
T (débiteurs du Trésor)
Il existe également une autre catégorie, le FSPRT (fichier de traitement des signaux pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste), qui a été créé après les attentats terroristes de 2015. Il s’agit d’un dossier hautement secret qui donne au gouvernement le pouvoir de traquer les personnes répertoriées.
Le fait d’être sur la liste S ne constitue pas à lui seul un crime, ni une accusation, et n’implique pas qu’il existe des poursuites judiciaires contre vous, ni des motifs d’en intenter.
Votre statut sur l’une de ces listes est temporaire. Si une personne inscrite ne commet pas d’infraction dans les deux ans, ses données seront supprimées et effacées du fichier.
Être sur la liste S ne vous disqualifie pas de vous présenter aux élections.
Ce n’était pas la première fois que M. Arnault se présentait aux élections ; il s’était déjà présenté dans la deuxième circonscription du Rhône, sous la bannière du parti anticapitaliste d’extrême gauche, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).
Opposition politique
M. Arnault a, sans surprise, dû faire face à sa part de critiques.
Son adversaire aux législatives, la RN Catherine Jaouen, écrit dans Valeurs Actuellesa déclaré qu’il n’avait « pas sa place à l’Assemblée nationale » en raison de son « militarisme d’extrême gauche ».
Le Parti socialiste (PS) local a critiqué sa candidature et s’est demandé pourquoi il représentait le Vaucluse alors qu’il est originaire de Lyon, dans une démarche qualifiée de « parachutage ».
“Je ne vois pas pourquoi on a besoin de lui ici, un militant antifasciste de Lyon”, a déclaré Cécile Helle, la maire PS d’Avignon.
Lire aussi : GRAPHIQUE : Les sièges par parti au nouveau parlement français
A lire aussi : Résultats des élections en France : comment votre région a-t-elle voté au dernier tour ?
Pourtant, M. Arnault, qui travaillait comme assistant d’éducation lorsqu’il a été élu, a depuis défendu ses opinions et ses actions passées, affirmant : « Je ne suis pas l’image qu’on a présentée de notre mouvement et de ce que j’ai pu faire au cours de mon militantisme. »
Le chef de file de LFI, Jean-Luc Mélenchon, s’est dit « fier d’avoir Raphaël Arnault parmi nous, car il se bat contre les fascistes ».
Lire aussi : La gauche bat l’extrême droite et remporte les élections françaises
M. Arnault, distancé de 10 points par le candidat du RN au premier tour, a reçu le soutien du NFP au second tour et a été élu à la surprise générale.
« Nous avons réussi en adoptant une position ferme contre l’extrême droite », a-t-il déclaré.