Le maire de New York, Eric Adams, a été inculpé par un grand jury de chefs d’accusation criminels fédéraux, selon deux personnes au courant du dossier.
L’acte d’accusation détaillant les charges retenues contre Adams, un démocrate, était toujours scellé mercredi soir, selon les personnes, qui ont parlé à l’Associated Press sous couvert d’anonymat car elles n’étaient pas autorisées à discuter publiquement de l’affaire.
Le bureau du procureur américain à Manhattan a refusé de commenter l’information. Le New York Times a été le premier à annoncer l’inculpation.
« J’ai toujours su que si je défendais les New-Yorkais, je serais une cible – et je suis devenu une cible », a déclaré Adams dans un communiqué qui laissait entendre qu’il n’avait pas été informé de l’inculpation. « Si je suis accusé, je suis innocent et je lutterai contre cela avec toute ma force et mon courage. »
Dans un discours enregistré à sa résidence officielle, Adams a reconnu que certains New-Yorkais remettraient en question sa capacité à gérer la ville pendant qu’il combat les accusations, mais il a juré de rester en fonction.
« Je suis confronté à ces mensonges depuis des mois… et pourtant la ville continue de s’améliorer », a déclaré Adams. « Ne vous y trompez pas. Vous m’avez élu pour diriger cette ville et je la dirigerai. »
On ne sait pas immédiatement quand les accusations seront rendues publiques ni quand Adams devra comparaître devant le tribunal.
L’acte d’accusation marque un tournant étonnant pour Adams, un ancien capitaine de police qui a remporté les élections il y a près de trois ans pour devenir le deuxième maire noir de la plus grande ville du pays sur une plateforme qui promettait une approche basée sur la loi et l’ordre pour réduire la criminalité.
Enquêtes en cours
Pendant une grande partie de l’année dernière, Adams a été confronté à un péril juridique croissant, avec de multiples enquêtes fédérales sur des conseillers de haut niveau produisant un rythme de citations à comparaître, de perquisitions et de départs de haut niveau qui ont plongé l’hôtel de ville dans une crise.
Il avait déclaré à plusieurs reprises qu’il n’était au courant d’aucun acte répréhensible et avait promis pas plus tard que mercredi après-midi de rester en fonction.
Adams est le premier maire de l’histoire de la ville de New York à être inculpé alors qu’il était en fonction. S’il devait démissionner, il serait remplacé par le défenseur public de la ville, Jumaane Williams, qui organiserait alors une élection spéciale.
La gouverneure de New York, Kathy Hochul, a le pouvoir de démettre Adams de ses fonctions. Son bureau n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaires mercredi soir.
Quelques heures avant l’annonce des charges retenues contre lui, la représentante américaine Alexandria Ocasio-Cortez avait appelé Adams à démissionner. Elle avait évoqué les enquêtes criminelles fédérales sur l’administration du maire et une série de départs inattendus de hauts fonctionnaires de la ville.
« Je ne vois pas comment le maire Adams peut continuer à gouverner la ville de New York », a écrit Ocasio-Cortez sur la plateforme sociale X.
Adams a réagi avec mépris, qualifiant Ocasio-Cortez de moralisatrice.
La nouvelle des enquêtes a éclaté l’année dernière
Les enquêtes fédérales sur l’administration Adams ont été rendues publiques pour la première fois le 2 novembre 2023, lorsque des agents du FBI ont mené une descente matinale au domicile de Brooklyn de la principale collectrice de fonds d’Adams, Brianna Suggs.
À l’époque, Adams avait assuré qu’il respectait la loi et avait déclaré qu’il serait « choqué » si quelqu’un de son équipe avait agi illégalement. « Je ne peux pas vous dire à quel point je commence la journée en disant à mon équipe que nous devons respecter la loi », avait-il déclaré aux journalistes à l’époque.
Quelques jours plus tard, des agents du FBI ont saisi les téléphones et l’iPad du maire alors qu’il quittait un événement à Manhattan. L’interaction a été révélée quelques jours plus tard par l’avocat du maire.
Le 4 septembre, les enquêteurs fédéraux ont saisi des appareils électroniques appartenant au commissaire de police de la ville, au chancelier des écoles, au maire adjoint chargé de la sécurité publique, au premier maire adjoint et à d’autres confidents d’Adams, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’hôtel de ville.
Les procureurs fédéraux ont refusé de discuter des enquêtes, mais des personnes au courant des éléments des dossiers ont décrit de multiples enquêtes distinctes impliquant des collaborateurs principaux d’Adams, des proches de ces collaborateurs, des collectes de fonds de campagne et un éventuel trafic d’influence des services de police et d’incendie.
Une semaine après les perquisitions, le commissaire de police Edward Caban a annoncé sa démission, expliquant aux policiers qu’il ne voulait pas que les enquêtes « créent une diversion ». Environ deux semaines plus tard, le chancelier des écoles David Banks a annoncé qu’il prendrait sa retraite à la fin de l’année.
Adams lui-même a insisté sur le fait qu’il continuerait à s’occuper des affaires de la ville et à laisser les enquêtes suivre leur cours.
Au cours de l’été, les procureurs fédéraux ont assigné à comparaître Adams, son bras droit de campagne et la mairie, demandant des informations sur l’emploi du temps du maire, ses voyages à l’étranger et ses liens potentiels avec le gouvernement turc.
Adams a passé 22 ans au sein du département de police de New York avant de se lancer en politique, d’abord en tant que sénateur d’État, puis en tant que président de l’arrondissement de Brooklyn, un poste essentiellement cérémoniel.
Il a été élu maire en 2021.
Baisse de popularité du maire
Après plus de deux ans au pouvoir, la popularité d’Adams a décliné. Alors que la ville a connu une augmentation du nombre d’emplois et une baisse de certaines catégories de criminalité, l’administration s’est préoccupée de trouver des logements pour des dizaines de milliers de migrants internationaux qui ont submergé les refuges pour sans-abri de la ville.
On constate également une vague constante d’accusations et un tourbillon de suspicions autour de personnes proches du maire.
Le procureur de Manhattan a porté plainte contre six personnes, dont un ancien capitaine de police proche de M. Adams, pour un projet présumé visant à verser des dizaines de milliers de dollars à la campagne du maire en manipulant les programmes de financement public dans l’espoir de bénéficier d’un traitement de faveur de la part de la ville. M. Adams n’a pas été accusé d’actes répréhensibles dans cette affaire.
L’ancien responsable de la sécurité des bâtiments d’Adams, Eric Ulrich, a été accusé l’année dernière d’avoir accepté 150 000 dollars de pots-de-vin et de cadeaux indus en échange de faveurs politiques, notamment en donnant accès au maire. Ulrich a plaidé non coupable et conteste les accusations.
En février, des enquêteurs fédéraux ont perquisitionné deux propriétés appartenant à l’une des proches collaboratrices d’Adams, Winnie Greco, qui avait collecté des milliers de dollars de dons de campagne auprès des communautés sino-américaines de la ville et était devenue plus tard sa directrice des affaires asiatiques. Greco n’a pas commenté publiquement les perquisitions du FBI dans ses propriétés et continue de travailler pour la ville.
Lorsque les agents ont saisi les appareils électroniques de Caban, l’ancien commissaire de police, début septembre, ils ont également rendu visite à son frère jumeau, James Caban, un ancien policier qui dirige une entreprise de conseil en vie nocturne.
Les agents ont également confisqué des appareils au chancelier de l’école, à son frère Philip Banks, ancien chef de haut rang du NYPD, aujourd’hui maire adjoint chargé de la sécurité publique, à leur frère Terence Banks, qui dirigeait une société de conseil promettant de mettre en relation les entreprises avec les acteurs gouvernementaux, et à la première adjointe au maire Sheena Wright, qui est la compagne de David Banks.
Tous ont nié tout acte répréhensible.
