Dans une étude récente, une équipe dirigée par le botaniste de Würzburg Kenji Fukushima a étudié la structure génomique de la plante carnivore Nepenthes gracilis et a montré comment la polyploïdie – le phénomène consistant à avoir plus de deux ensembles de chromosomes dans les cellules – contribue à l’innovation évolutive. Fukushima dirige un groupe de travail à la Chaire de Botanique I de la Julius-Maximilians-Universität Würzburg (JMU).
Les résultats de l’étude ont maintenant été publiés dans la revue Plantes naturelles.
Sur la piste de la domination du sous-génome
Les génomes végétaux sont connus pour leur structure complexe, et l’étude des génomes polyploïdes dotés de plusieurs ensembles de chromosomes permet aux chercheurs de répondre à de profondes questions sur la génétique. “Nos résultats fournissent non seulement des informations clés sur le paysage adaptatif du génome de Nepenthes, mais élargissent également notre compréhension de la façon dont la polyploïdie peut stimuler l’évolution de nouvelles fonctions”, déclare le professeur Victor Albert de l’Université de Buffalo. Albert est le co-auteur principal de l’étude.
Une question centrale concerne le mécanisme de dominance dite du sous-génome, qui influence la rétention et l’expression des gènes sur plusieurs ensembles de chromosomes.
Ce processus conduit souvent à un sous-génome dominant, plus riche en gènes. Les sous-génomes récessifs, en revanche, perdent des gènes. Dans leur étude, Fukushima et son équipe se sont concentrés sur la structure génomique jusqu’alors inconnue de Nepenthes gracilis et ont étudié la relation complexe entre les sous-génomes.
Les sous-génomes récessifs comme moteurs d’innovation
En utilisant des techniques modernes de séquençage à haut débit et des analyses bioinformatiques, les chercheurs ont pu identifier une structure génomique décaploïde (le fait qu’il y ait 10 ensembles de chromosomes dans une cellule) chez la sarracénie tropicale. Ce faisant, ils sont tombés sur une signature claire de dominance du sous-génome, qui a conduit à un sous-génome dominant et à quatre sous-génomes récessifs.
“Cependant, il s’est avéré intéressant de constater que ce sont les sous-génomes récessifs qui sont enrichis de nouveaux gènes. Cette découverte surprenante suggère que les sous-génomes récessifs apportent une contribution importante à l’adaptation évolutive de la plante”, explique Fukushima. Cela est particulièrement vrai pour définir des caractères tels que les feuilles de pichet, qui sont utilisées pour attraper les insectes, et la dioïcie, la présence de plantes mâles et femelles distinctes.
Dans des analyses plus approfondies, l’équipe a identifié des gènes spécifiques sur les sous-génomes récessifs qui peuvent être liés à ces traits uniques. Un exemple intéressant est celui d’un gène spécifique à l’homme sur le chromosome Y nouvellement identifié, qui pourrait jouer un rôle crucial dans la dioïque. Ils ont également découvert un groupe de gènes spécifiquement exprimés dans les pichets pièges qui contribuent probablement à l’évolution du carnivore chez Nepenthes.
Applications possibles en agriculture
En plus de rechercher la génétique de Nepenthes gracilis, l’étude contribue à la compréhension générale du rôle de la polyploïdie dans l’évolution et de la manière dont de nouveaux gènes apparaissent. Les connaissances acquises pourraient également être appliquées à d’autres domaines de la recherche sur les plantes et améliorer notre compréhension du génome végétal et de la manière dont les plantes peuvent former des caractères complexes et nouveaux. En outre, les résultats permettent de tirer des conclusions sur la diversité végétale et l’adaptation en général et peuvent apporter de précieuses contributions à l’agriculture, par exemple.
“Les mécanismes de transport et de reproduction des nutriments y sont particulièrement intéressants”, explique Fukushima. Les résultats de l’étude pourraient aider à mieux comprendre ces processus et ainsi contribuer à des pratiques agricoles durables et efficaces.
Plus d’information:
Franziska Saul et al, La dominance du sous-génome façonne une nouvelle évolution génétique chez la sarracénie décaploïde Nepenthes gracilis, Plantes naturelles (2023). DOI : 10.1038/s41477-023-01562-2
Fourni par Julius-Maximilians-Universität Würzburg
Citation: Une étude révèle une nouvelle évolution génétique chez la sarracénie décaploïde Nepenthes gracilis (24 novembre 2023) récupérée le 24 novembre 2023 sur
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