Le Sénat a voté en faveur d’un projet de loi interdisant le langage non sexiste dans les communications officielles en France.
La loi sera désormais soumise au vote des députés, même si aucune date n’a encore été annoncée.
Le président Macron s’est récemment prononcé contre l’adaptation de la langue française sous le poids de la pression culturelle, affirmant que la France « ne doit pas céder aux tendances ».
La loi, proposée par la sénatrice de droite (Les Républicains) Pascale Gruny (Aisne), vise à interdire l’usage d’une telle langue « chaque fois que la législation (ou les organismes de réglementation) exigent qu’un texte soit rédigé en français ».
L’interdiction s’étendra aux documents sur le lieu de travail, à la publicité et aux contrats.
La langue en question comprend :
- iel utilisé pour les deux il et elle – ou lui et elle
- ceux-làutilisé pour les deux celles et ceux-là – ou celles-ci
- L’utilisation du suffixe .e à la fin des mots. Par exemple “président.es», pour désigner à la fois les présidents hommes et femmes.
Le projet de loi qualifie ces usages de « pratiques typologiques et éditoriales visant à substituer l’usage de la forme masculine, bien qu’utilisée de manière générique, afin de mettre en évidence l’existence d’une forme féminine ».
On ne sait pas exactement comment cette loi fonctionnerait.
Les sénateurs ne sont pas d’accord sur la question de savoir si l’utilisation de formes combinées masculines et féminines telles que né(e)le (né le), constitue un langage inclusif en matière de genre.
De même, ils ne sont pas d’accord sur le point de savoir si cette loi oblige les gens à utiliser des doubles mentions gênantes telles que français, française ou sénateurs, sénatrices lorsqu’il s’agit d’un groupe mixte.
Un débat entre divisions politiques
Le Sénat a adopté lundi 30 octobre le projet d’interdiction des propos non sexistes par 221 voix contre 82, et de nombreux sénateurs de gauche ont voté contre.
“Les sénateurs de droite nous imposent leurs caprices rétrogrades et réactionnaires”, a argué le sénateur socialiste Yan Chantrel, ajoutant que “les tentatives de geler la langue conduiraient à sa mort”.
La sénatrice écologiste Mathilde Ollivier s’est également prononcée contre.
« Lorsque nous parlons de langage inclusif, nous entendons en réalité une voie vers l’égalité entre les femmes et les hommes », a-t-elle déclaré.
Sur X (anciennement Twitter), Marine Le Pen, du Rassemblement national d’extrême droite, a soutenu l’interdiction, arguant que la langue française est un trésor qui « doit être protégé contre le wokisme, dont le langage inclusif est une autre manifestation sinistre et grotesque ».
La ministre de la Culture Rima Abdul-Malak a qualifié l’interdiction d’« excessive ».
« Le rôle de l’État ne devrait pas être de contrôler le langage mais de garantir l’égalité des peuples en son sein », a-t-elle déclaré.
S’exprimant dans l’Aisne lors de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française, centre dédié à la promotion de la langue et de la culture françaises, le président Macron a déclaré : « Dans notre langue, le masculin fait office de neutre.
« Il faut adhérer aux fondements de sa grammaire, à la force de sa syntaxe. Nous n’avons pas besoin d’ajouter des points au milieu des mots ni d’utiliser des traits d’union ou d’autres éléments pour le rendre compréhensible.
“Un obstacle à la compréhension”
Si bon nombre des arguments en faveur d’une interdiction ont porté sur la préservation de la langue française, les auteurs de la loi se sont davantage préoccupés de l’intelligibilité d’un langage non genré, qu’ils ont qualifié d’« obstacle à la compréhension et à la facilité de lecture ». “
L’Académie française avait déjà soutenu ce point dans une lettre ouverte décourageant l’utilisation d’un tel langage en 2021.
« Un langage inclusif est contraire à la nature démocratique du langage », écrivait Hélène Carrère d’Encausse, alors secrétaire perpétuelle.
« Outre le fait qu’elle ne correspond pas à la langue parlée, elle impose essentiellement une seconde langue dont la complexité pénalise les personnes ayant des déficiences cognitives, comme la dyslexie, la dyspraxie ou l’apraxie.
« En fin de compte, cette tentative de rendre les choses plus justes ne fait que renforcer les inégalités. »
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