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Un Français raconte le sort de son mari emprisonné pour « secret d'État »

by News Team
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La France et la Chine célèbrent samedi 60 ans de relations diplomatiques – mais tout le monde ne fait pas la fête. Lorsque le Français François Dupouy a épousé l'amour de sa vie, le Chinois Wu Xianle, il ne s'attendait pas à ce que son mari disparaisse dans une prison de Pékin. Trois ans plus tard, RFI interviewe Dupouy sur son sort et sur l'opacité des lois chinoises sur la sécurité de l'État.

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Dupouys, l'ancien cadre d'une multinationale française de construction, âgé de 77 ans, a rencontré Wu alors qu'il prenait sa retraite et se rendait en Chine pour étudier à l'Université des langues de Pékin.

Il avait 62 ans lorsqu'il a rencontré Wu et les deux sont tombés amoureux. Le mariage homosexuel n'étant pas légal en Chine, le couple s'est rendu à Paris où ils se sont mariés à l'été 2009.

François Dupouy et Wu Xianlie lors de leur cérémonie de mariage le 26 avril 2014 à la mairie du 11e. Arrondissement de Paris. © Courtesy François Dupouy

Wu vient d'une famille « rouge ». Cela signifie que son père et les autres membres de sa famille sont des membres de longue date du Parti communiste chinois (PCC) et de sa branche armée, l'Armée populaire de libération (APL).

Wu a fait carrière au sein de l'establishment bureaucratique chinois, passant de la prestigieuse École centrale du Parti à la PLAir Force. Il a fini par devenir directeur marketing du Centre d'amitié du Département du Front uni, un puissant organe du PCC chargé de maintenir le contact entre le PCC et les non-communistes, les minorités et les Chinois de l'étranger.

Il y a trois ans cette semaine, le 26 janvier 2021, Wu disparaissait soudainement.

RFI : Décrivez les circonstances dans lesquelles cela s’est produit ?

François Dupouy : Il a été arrêté alors qu'il se rendait à son bureau. Il conduisait sa voiture et les autorités l'ont arrêté et emmené dans un centre de détention quelque part à Pékin.

Quelques jours plus tard, le chef de son bureau a appelé sa fille pour lui dire que son père avait été arrêté. Ils voulaient les clés de l'appartement pour pouvoir le fouiller. Lorsqu'elle s'y rendit deux jours plus tard, l'ordinateur et sa tablette avaient disparu. Tous les livres et documents des étagères avaient disparu. Et le reste de l’appartement était en désordre.

Pendant les 12 mois suivants, il n’y a eu aucune nouvelle. Nous ne savions pas s'il était mort ou vivant. Puis, en janvier 2022, on lui a annoncé que son père serait jugé. Elle a commencé à chercher un avocat. Mais tous les avocats qu’elle a consultés à Pékin ont refusé de s’occuper de cette affaire, parce qu’elle était politique. Des diplomates européens m'ont dit que les défenseurs des droits de l'homme qui avaient quitté la Chine se cachaient, avaient complètement arrêté de travailler ou étaient en prison.

En février 2022, un procès s’est tenu quelque part à huis clos, avec un avocat choisi par le PCC. Mon mari n'était même pas présent au procès. Ils ont dit qu’à cause du Covid, c’était trop dangereux pour lui d’y aller.

RFI : De quoi lui est-on reproché ?

FD : L'avocat du PCC a dit à sa fille qu'il s'agissait d'un « secret d'État ». Alors, où vas-tu à partir de ça ? Deux mois après le procès, il a été condamné à 11 ans de prison à compter du jour de son arrestation. Il a également dû payer une amende de 300 000 yuans (40 000 €). Curieusement, ils ne l’ont pas encore affirmé, mais ils le feront.

RFI : Comment est-il traité ?

FD : Au début, il avait droit à des visites une fois par mois pendant 30 minutes et avait le droit d'écrire et de recevoir des lettres. Au bout d'un mois, il a été transféré de la prison de Pékin à celle de Tianjin.

Sa fille est autorisée à lui rendre visite à Tianjin une fois par mois, seule ou avec l'un de ses huit frères et sœurs. Chaque fois qu’elle lui rendait visite, il devenait de plus en plus mince. Donc je ne sais pas à quel point il sera mince au final.

Affiche de propagande dans une prison chinoise. "Réformez les criminels, créez des talents."
Affiche de propagande dans une prison chinoise. “Réformez les criminels, créez des talents.” © RFI/Jan van der Made

En août dernier, il s'est cassé deux doigts de la main droite, soi-disant en tombant sur son lit. On lui a diagnostiqué un décollement de rétine aux deux yeux. Comme il n'est pas myope et qu'il n'a que 56 ans, mon médecin m'a dit que cela était très certainement dû à un coup à la tête.

C'est assez effrayant car le décollement de la rétine, s'il n'est pas guéri rapidement, pourrait conduire à la cécité. Qui lui a donné un coup sur la tête ? Les détenus ou les gardiens ? Nous ne le savons pas. Mais c'est la situation actuelle.

*Dupouy a depuis déclaré par courrier à RFI que le décollement de rétine de Wu avait désormais été traité par chirurgie au laser. Il a également accès à un magasin général où il peut acheter de la nourriture, des articles de toilette et des livres.

RFI : Pouvez-vous décrire les autres détenus ?

FD : Il y a 12 personnes âgées entre 20 et 30 ans. Il y a plusieurs meurtriers et un proxénète. Il y a un homme religieux, un chrétien. Les autres sont des criminels. La fille de Wu lui a demandé s'ils l'avaient touché, car les homosexuels en prison peuvent être maltraités par les autres détenus. Il a dit qu'il ne l'avait pas été, mais qu'il était constamment insulté. Je suppose qu'il l'ignore.

RFI : En rendant publique, n'avez-vous pas peur que cette affaire s'aggrave ?

FD : À quel point cela pourrait-il être pire ? Ils lui ont cassé les doigts. Ils lui ont abîmé les yeux. Et ils l'ont sous-alimenté. Bien sûr, cela peut toujours être pire. J'attends depuis trois ans. Je n'ai pas fait de bruit depuis trois ans parce que je ne voulais pas gâcher ses chances d'obtenir la clémence. Ils ne le laissent pas m'écrire donc je n'ai aucun contact avec lui. On ne peut pas l'accuser de tirer les ficelles d'actions à l'étranger et je le fais donc tout seul. C'est pourquoi j'ai décidé de le rendre public. Je veux que les gens sachent à quel point le gouvernement chinois se comporte de manière horrible envers son propre peuple.

François Dupouy, dont le mari chinois Wu Xianle a été condamné à 11 ans de prison lors d'un procès à huis clos impliquant des personnes non définies "secrets d'État." Lui Dupouy fait désormais campagne pour le faire sortir.
François Dupouy, dont le mari chinois Wu Xianle a été condamné à 11 ans de prison lors d'un procès à huis clos impliquant des « secrets d'État » non définis. Lui Dupouy fait désormais campagne pour le faire sortir. © RFI/Jan van der Made


Cette interview a été légèrement modifiée pour plus de clarté

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